LA PETITE MARCHANDE

 
Elle s'en va, pauvrette
A pas légers, à pas menus,
Le col, les bras et les pieds nus
Vendre des allumettes
 
Et cela chaque soir,
La caissette au buste attachée,
On la voit modeste et cachée
Au détour d'un trottoir.
 
En quête d'une offrande,
A Gênes s'en allait ainsi
La tête au vent, le coeur transi
La petite marchande.
 
Elle entre au Restaurant
En fait le tour belle et naïve,
Mais soudain pressé et craintive
S'en échappe en courant.
 
Parfois sur la bouche, un sourire,
Dans les yeux, un éclair,
Quelqu'un payant plus cher
La boîte où le Dôme se mire.
 
Un soir, je l'aperçus
Mais elle était accompagnée
D'une sœur en robe fanée
Et souliers décousus...
 
Elles semblaient ravies
Avançait la main dans la main
Sur le précoce et dur chemin
D'une émouvante vie.
 
Bientôt ce fut la course
Pour gagner le pauvre grabat
S'y blottir et pleurer tout bas
Le vide de la bourse.
 
Le corps lassé, le coeur transi.
Et sans aucun offrande,
A Gênes, s'endormait ainsi
La petite marchande.
 

Philippe Straehl